De la même façon que rien n’interdit, loin s’en faut, de proposer au piano la musique baroque française pour clavecin (Alexandre Tharaud, notamment, l’avait prouvé par un mémorable disque Rameau chez le même éditeur), pourquoi se priver de jouer Marin Marais sur instruments « modernes » ? Tel est le postulat, assumé et abouti, de Jean-Guihen Queyras qui, sur son violoncelle, reprend et transcrit la musique de l’immortel maître de la viole de gambe, avec le même Tharaud comme complice.

Certes, le violoncelliste français a conscience des limites de la démarche. Mais aussi de ses potentialités : « Je cherchais en préparant ce disque à retrouver sur mon violoncelle les harmoniques aiguës de la viole qui sont si importantes et qui donnent à ce répertoire ce sentiment de fragilité et de transparence très touchant… En explorant les possibles, j’ai senti qu’il me fallait lâcher prise pour accepter qu’advienne une autre sonorité, différente de celle de la viole, empreinte d’un autre type de profondeur. Le respect du  » caractère  » échappait à l’  » imitation pure « . C’est précisément à la lisière ténue entre respect du répertoire et invention, en nous plaçant toujours au service de la force lumineuse de l’œuvre de Marin Marais devant laquelle l’instrument moderne et l’interprète s’inclinent, que « quelque chose d’autre » peut se révéler. »

La démonstration est réussie, commençant et se terminant avec des extraits de la suite en la mineur et passant notamment par les Couplets des folies d’Espagne, La Rêveuse ou le fameux Tableau de l’Opération de la Taille (avec Guillaume Gallienne en récitant). De quoi réjouir les fans de Queyras, ceux de Tharaud et même ceux de Marais.

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