CONCERT – La Philharmonie de Paris lance l’anniversaire Boulez (né en 1925), dans la grande salle Pierre Boulez, avec des compositions phares de Boulez. Du Boulez partout donc, mais cela sans compter la présence d’un autre Pierre aux commandes, le magicien (et chef d’orchestre) Pierre Bleuse.
Tours en tout genre
Cette soirée d’ouverture est marquée par une volonté de « montrer Boulez » dans toute sa variété. La masse orchestrale ne cesse de se réarranger, sur scène comme hors scène (dans le gigantesque Répons, avec des musiciens aux quatre coins de la salle, dans le public), et les musiciens se croisent, tout autant que les compositeurs. L’œuvre de Pierre Boulez semble ainsi se situer entre le canonique Debussy et la jeune compositrice (qui est-ce ? entend-on dans le public) Charlotte Bray, une Sonatine piano-clarinette et des ordinateurs composant en temps réel.
Aux amis de Pierre Boulez se succèdent les hommages, donnant lieu à de très beaux moments de musique comme le Messagesquisse, pièce pour violoncelle solo et six violoncelles qui donne lieu à une standing ovation pour Jean-Guihen Queyras, qui transcende les motifs et variations de Boulez tel un alchimiste. On cherche alors à trouver le « truc » et à comprendre ce qu’il se passe, mais Pïerre Bleuse, en bon chef d’orchestre de l’Ensemble InterContemporain, créé en 1976 par Pierre Boulez, nous maintient dans le monde mystérieux de Boulez.
Machineries et petits trucs
Si Pierre Bleuse reste discret dans les premières pièces du concert, il se révèle dans la seconde partie, avec une direction à mi-chemin entre le démiurge et le tour de magie, pourtant sans baguette ! C’est avec les mains que le chef-magicien nous donne à voir tour à tour le xylophone, la harpe ou les pianos de Répons. Dans l’atmosphère plutôt austère de la grande salle Pierre Boulez, on assiste à des jeux de lumières inédits, mais aussi à des jeux sonores des techniciens de l’IRCAM qui frisent la saturation.
Les musiciens, plutôt rétifs dans les premiers moments de la soirée, s’embarquent avec les deux Pierre dans une ronde qui n’en finit plus (Répons fait presque 45 minutes). Le public est sous le charme, et les manières de Pierre Bleuse, devenu complètement mystique, semblent faire renaître le temps d’une soirée particulièrement ensorcelante l’écriture endiablée de Pierre Boulez.