Le trio formé par les solistes Isabelle Faust, Alexander Melnikov et Jean-Guihen Queyras se produisait lundi soir dans une salle Bourgie comble, au lendemain d’un concert au Palais Montcalm pour le Club musical de Québec. La soirée, autour du Trio n° 1 de Brahms et du Trio n° 2 de Schumann a été marquée par une cohésion et un raffinement des nuances très maîtrisés, au profit d’une expression pudique et raffinée.

La description du concert du Trio Faust, Melnikov, Queyras n’a pas besoin de beaucoup de mots. En un titre et une introduction les principales choses sont dites. Sans doute est-il pourtant utile de dire ce que ce concert n’était pas. Ces trois interprètes étant férus de musique baroque et de connaissances « historiquement informées », on pouvait craindre une application de cette « conscience » post-baroque à Schumann et Brahms. En d’autres termes, une gestion parcimonieuse du vibrato, avec une expressivité corsetée. Nous n’avons, heureusement, pas eu cela.

Pudeur

Faust, Melnikov, Queyras jouent délibérément le romantisme de Schumann et Brahms. Ils le jouent de manière parfois confidente (l’entrée de Melnikov du Trio de Brahms) ou à pas feutrés (le Finale de Brahms) et il reste de la pratique baroque et classique certains « jeux sonores » ou certaines palettes qui vont plus loin que celles d’autres trios, par exemple cette sorte de crispation saisissante dans les dernières 90 secondes du 3e mouvement du 2e Trio de Schumann.

Mais, comme lorsque Gidon Kremer et Krystian Zimerman avaient joué les Trois Sonates pour violon et piano de Brahms en 2006 au Club musical de Québec, nous sommes ici beaucoup plus dans la recherche de la fusion des sonorités et la subtilité de l’imbrication des phrases que dans la joute instrumentale. C’est ce qui justifie sans doute que le diptyque d’un jour côtoie les Épigrams d’un Elliott Carter centenaire, autant de petits haïkus sonores contrastés.

Ce qui restera au premier chef de la soirée ce sont avant tout les extinctions de mouvements, comme dans des rêves, tellement elles étaient millimétrées en qualité de nuances et de cohésion instrumentale. On pense ici aux mouvements 2 et 3 de Schumann et 2 et 3 de Brahms avant tout. Il y avait aussi ces beaux passages de consonance ou de fusion des coloris entre Faust et Queyras. On sentait, à les regarder, que les musiciens goûtaient ces instants.

Le trio a offert au public admirable, car très silencieux pendant tout le concert, le mouvement lent du 3e Trio de Schumann en rappel.

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