La magie de ce CD débute dès les premières notes, à travers l’univers sonore créé par le piano Érard choisi par Alexander Melnikov pour la sonate de Chopin. Associé au son mordoré du violoncelle Gioffredo Cappa (1696) de Queyras, il confère immédiatement une patine assez unique aux élans chopiniens (magnifique dosage des montées en puissance, par exemple, autour de 11 minutes dans le 1er mouvement). Melnikov troque évidemment l’Érard pour un Steinway plus scintillant dans la Sonate op. 19 de Rachmaninov. On ne peut que répéter ici quelques remarques plusieurs fois formulées sur l’apport de tels musiciens à l’interprétation d’oeuvres chambristes (il en va de même pour Zimmermann et Helmchen dans les sonates pour violon et piano de Beethoven) : nous n’avons pas ici une « joute de gros bras », mais une attentive connivence visant la plus grande subtilité et la plus grande fluidité. Il n’y a donc pas de « gestes », le son n’est pas gros et le nectar est à trouver dans la transition entre les phrases et la respiration musicale. C’est là que se niche l’âme de la musique.

Chopin, Rachmaninoff

★★★★ 1/2
​Classique

J.-G. Queyras, A. Melnikov, Harmonia Mundi HMM 902 643

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